Babylone historique (..2..suite)

Babylone face à la domination assyrienne
Bas-relief du palais royal deNinive, représentant des soldatsassyriens comptabilisant leur butin au cours d'une campagne enBabylonie.

La fin du xe siècle av. J.-C. est marquée par le rétablissement de la monarchie assyrienne par Adad-Nirari II. Celui-ci devient menaçant pour Babylone, mais il est repoussé par Nabû-shum-ukin (880 av. J.-C.–860 av. J.-C.), qui réussit à améliorer momentanément la situation de son royaume. Après sa mort, une crise de succession secoue Babylone, dont profitent les rois assyriens. Le reste du ixe siècle av. J.-C. est marqué par des luttes dynastiques à Babylone et en Assyrie, dont profite à son tour l'un ou l'autre des deux royaumes pour établir sa suprématie sur son voisin. Les Assyriens finissent par l'emporter vers 800 av. J.-C., et la Babylonie tombe à nouveau dans le chaos, des rois Chaldéens tentant de s'établir à Babylone. Ces luttes internes finissent par profiter au royaume assyrien, qui est devenu un véritable Empire sous le règne de Teglath-Phalasar III. Après plusieurs années de luttes, celui-ci réussit à prendre Babylone en 728 av. J.-C., et il s'y proclame roi.

La domination assyrienne n’est pour autant pas assurée, et le nouveau souverain Sargon II (qui a restauré des temples et les remparts de Babylone) doit faire face à un adversaire coriace en Babylonie, Mérodach-baladan, qui réussit à régner sur la cité à deux reprises. Sennachérib, le successeur de Sargon II, faisant face à de nouvelles révoltes en Babylonie, place un de ses fils sur le trône de la cité. Ce dernier tient peu de temps, une nouvelle révolte babylonienne survenant. Les comploteurs le capturent, et le livrent à leurs alliés élamites qui l’exécutent. La réplique de Sennachérib est terrible, et le récit qu’il en laisse est plein de haine contre Babylone, qu’il souhaite anéantir, se vantant de l’avoir rasée, et apparemment la statue de Marduk n’est pas enlevée, mais détruite. Son fils Assarhaddon choisit la voie de l’apaisement, et entreprit de restaurer la cité, entreprise longue et coûteuse (en partie payée avec le butin d’une campagne en Égypte), qui ne pris fin que sous le règne suivant, celui d’Assurbanipal.

Assurbanipalreprésenté en bâtisseur, sur une stèle commémorant la restauration de l'Esagil.

La succession d’Assarhaddon, en 652 av. J.-C., avait en fait donné lieu à une organisation politique spéciale : Assurbanipal régnait depuis l’Assyrie, alors que son frère Shamash-shum-ukin était placé sur le trône de Babylone, en position de vassal. Ce dernier se révolte finalement en 652 av. J.-C., mais finit par être vaincu après une guerre âpre de quatre ans. Il meurt lors du siège de Babylone, brûlé (peut-être volontairement), histoire qui donna naissance au mythe grec de Sardanapale. Assurbanipal se révèle moins brutal que son grand-père, et restaure Babylone, rapportant ou refaisant une statue de Marduk, acte de réconciliation très symbolique.

Même sous la domination étrangère les élites lettrées et marchandes de Babylone se battent avec énergie pour le maintien du statut de grande ville religieuse, dont les habitants sont exemptés de toute charge fiscale. Un texte pro-babylonien de cette époque, le Miroir du Prince, estime que la fiscalité royale ne peut concerner Babylone, ainsi que Nippur et Sippar.

 

La dynastie chaldéenne et l'apogée de Babylone

Cette succession de révoltes en Babylonie a sans doute affaibli l'Assyrie, tandis qu'à Babylone l'esprit de résistance était de plus en plus fort, et les résistants de plus en plus actifs et unis. À la mort d'Assurbanipal en 627 av. J.-C., ses successeurs rentrent dans une querelle de succession qui est fatale à leur royaume. Nabopolassar, sans doute le gouverneur de la région du Pays de la Mer, et probablement d'origine chaldéenne, profite des troubles en Assyrie pour prendre le pouvoir à Babylone en 625 av. J.-C. Il prétend soutenir l'un des prétendants assyriens, Sin-shar-ishkun qui lui confère l'autorité sur Babylone en échange de son appui militaire. Après quelques années de conflit, il réussit finalement à abattre l'Empire assyrien, avec l'aide du roi des Mèdes, Cyaxare, entre 614 av. J.-C. et 610 av. J.-C. Son filsNabuchodonosor II (605 av. J.-C.–562 av. J.-C.) lui succède. Avec lui, Babylone connaît son apogée. Il fonde l'empire dit Néobabylonien qui couvre une grande partie du Proche-Orient des frontières de l'Égypte jusqu'au Taurus anatolien et aux abords de la Perse.

Les règnes de Nabopolossar et Nabuchodonosor II correspondent à une période de profondes transformations de la ville, initiées par le premier et achevées par le second, connues par de nombreuses inscriptions de fondation. Ce sont ces travaux qui vont contribuer à l'image, légendaire, reproduite par Hérodote d'une ville ceinte par des murailles de 25 mètres de hauteur. En réalité Nabuchodonosor fait restaurer totalement les deux enceintes traditionnelles de Nimit-Enlil et Imgur-Enlilsur une longueur d'environ 8 kilomètres, lesquelles enserrent la surface bâtie de la cité. Puis il fait construire une seconde muraille externe d'environ 11 kilomètres qui part de la colline de Babil 300 mètres au nord de la ville et rejoint l'Euphrate au sud. Elle entoure une zone agricole qui pouvait contribuer au ravitaillement de Babylone en cas de siège. Les monuments principaux de la cité sont restaurés : palais royal, temples, ziggurat, artères principales, dont la « Voie processionnelle » partant de la Porte d’Ishtar.

Quelques corpus d’archives sont datés de cette période. Du palais royal proviennent des listes de rations, qui ont la particularité de mentionner le roi de JudaJoaquin et ses fils, déportés par Nabuchodonosor et hébergés au palais. Les temples ont également livré des tablettes scolaires temple de Ninmah et de Nabû). Des lots d’archives privées, retrouvés dans les quartiers résidentiels au sud de la ville, près du temple de Ninurta, nous informent quant à eux sur les activités de famille de notables, les descendants de Nur-Sîn, Nappāhu, et surtout les Egibi, qui se constituent une propriété foncière importante dans la ville et dans la campagne environnante.

Les successeurs de Nabuchodonosor II réussissent à tenir tant bien que mal leur royaume, mais ils n'ont pas la trempe des fondateurs de la dynastie. Le dernier roi de Babylone, Nabonide (556 av. J.-C.–539 av. J.-C.), est un personnage énigmatique qui réussit à se mettre à dos une grande partie des nobles de son royaume.

 

Babylone sous domination étrangère
Le Cylindre de Cyrus, British Museum .
Livius.

Quand le roi des Perses Cyrus II attaque Babylone en 539 av. J.-C. par une attaque surprise contre la porte d'Enlil au nord ouest de la ville, la lutte tourne court et la cité et l'Empire tout entier tombe entre ses mains. Dès lors, Babylone perd son indépendance. Le nouveau maître de la cité proclame néanmoins son souhait de préserver la cité, et s’attache les faveurs du clergé local en proclamant un décret très favorable envers eux, qui a été retrouvé inscrit sur un cylindre d’argile trouvé à Babylone.

La chute du royaume babylonien et la fin de l'indépendance politique ne signifient pas le déclin de la métropole mésopotamienne. Certes à deux reprise la ville se révolte contre Darius Ier (en 520 av. J.-C.–519 av. J.-C. puis en 514 av. J.-C.) et celui-ci finit par démanteler une partie des fortifications. Mais sous la domination des Achéménides Babylone reste la ville la plus développée économiquement de la région et la plus peuplée, même on lui enlève les parties orientales (la Transeuphratène) de la province qu’elle dirigeait au départ, issues de son ancien empire. De plus elle a rang de ville impériale et offre aux souverains perses une résidence hivernale. Il est possible que cette époque ait vu un changement du cours de l'Euphrate, qui aurait alors coupé le palais royal du reste de la partie orientale de la cité en allant couler le long de son angle sud, le séparant du quartier sacré. Des textes de la fin du ve siècle documentent les activités économiques d'un gouverneur de Babylone, Bēl-shunu.

En 331 av. J.-C., l'Empire achéménide tombe entre les mains du roi macédonien Alexandre le Grand après la victoire de Gaugamèles. Des négociations s'ouvrent entre Alexandre et l'aristocratie de Babylone. La ville se rend sans combats trois semaines plus tard et un satrape, rallié au souverain macédonien Mazaios, en devient le gouverneur. Babylone semble accueillante pour les nouveaux vainqueurs, selon ce que rapportent les chroniqueur grecs. Alexandre se montre habile en ordonnant la restauration de l'Esagil se ralliant ainsi les prêtres du culte de Marduk. Souhaite-t-il faire de sa nouvelle conquête sa capitale ? C'est plausible car nulle part, selon Quinte-Curce, il ne réside aussi longtemps en Asie. Les derniers mois de son règne semblent consacrés à l'administration et à des travaux dans les alentours de la ville. Il établit également un atelier de frappe pour les émissions monétaires à son propre type, les « alexandres ». C'est enfin à Babylone qu'il meurt de maladie, le 10 juin 323 av. J.-C., dans le palais qu'avait bâti et habité Nabuchodonosor II, et qu’il avait peut-être entrepris de restaurer.

Le nouveau maître de la Mésopotamie, Séleucos Ier, général d'Alexandre le Grand, s'empare de Babylone en 312 av. J.-C. mais préfère construire une nouvelle capitale, Séleucie du Tigre et n'hésite pas à utiliser des matériaux de constructions pris à Babylone. Mais les rois séleucides sont toujours respectueux de la prestigieuse cité, et ils restaurent certains de ses monuments, et lui laissent le statut de capitale provinciale, ce qui ne l’empêche pas de décliner. Babylone est promue au rang de cité, sans doute sous Antiochos IV (vers 170 av. J.-C.), et les textes cunéiformes parlent alors de puliṭē ou puliṭānu (« citoyens », politai), dirigés par un épistate, et qui se réunissent dans un théâtre (appelé en akkadien bīt tamartu, « maison/lieu où on voit ») construit à l'est de la zone sacrée.

Mais la ville reste peu hellénisée, et la population autochtone demeure majoritaire, représentée devant les autorités grecques par l’Esagil, qui a donc un poids très important dans la vie de la cité. Il est dirigé par le kiništu, un conseil, présidé par le šatammu (administrateur), qui gèrent un domaine foncier toujours important, et sont chargés de l’organisation du culte des autres temples de la ville. Les archives cunéiformes de l'Esagil restent en nombre assez important par rapport aux autres villes de la région où elles se tarissent progressivement, et renseignent sur ses activités cultuelles et économiques. C’est de ce temple qu’est issuBérose, prêtre qui tente de faire connaître la civilisation mésopotamienne antique aux Grecs, dans ses Babyloniaka.

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