Industrialisation des aliments...
Les fermes familiales s’industrialisent
Après la deuxième guerre mondiale, la plupart des pays d’Europe ne parvenaient pas à satisfaire leurs besoins alimentaires. Afin d’augmenter la production agricole, de nouvelles méthodes de production ont été développées au dépens des techniques traditionnelles telles que la rotation et associations de cultures Ces changements ont permis à une grande partie de l’Europe d’atteindre l’autosuffisance alimentaire jusqu’aux années soixante.
Comme ses pays voisins, la France a massivement adopté ces nouveaux modes de production. Alors que la modernisation et la mécanisation de l’agriculture entraînaient la disparition de nombreux emplois agricoles, le secteur industriel en pleine croissance nécessitait une main d’œuvre abondante.
Dans les années soixante-dix, l’agriculture est confrontée à de nouveaux défis. L’industrie agro-alimentaire s’est développée en France comme dans d’autres pays du Nord de l’Europe.
Si auparavant, les gains de production - grâce à la mécanisation et une meilleure gestion du territoire - ont permis d’augmenter les revenus des agriculteurs, dès les années soixante-dix, l’industrie agro-alimentaire se développe et pèse dans le monde agricole. Les paysans se retrouvent de plus en plus dans une situation de dépendance – dépendance sur tout le processus de production (produits chimiques, semences, services vétérinaires), mais aussi en aval de la production (transformation et commercialisation).
Les paysans doivent investir dans des techniques de plus en plus sophistiquées ce qui entraîne l’augmentation des coûts de production, tandis que l’industrie agro-alimentaire fait pression pour baisser les prix des matières premières et augmenter la valeur ajoutée des produits qu’elle transforme. (Voir graphiques 1 et 2).
Face à des coûts de production élevés et des prix bas non-rémunérateurs, les paysans sont de plus en plus contraints à augmenter leur production pour survivre. Banques, coopératives et « partenaires industriels » font pression sur les paysans afin qu’ils s’engagent vers des modes de production industrielle qui les obligent à investir fortement dans de nouvelles technologies et à produire des matières premières à bas prix pour l’industrie agro-alimentaire. Les producteurs sont ainsi pieds et poings liés au système
Les fermes familiales au centre de l’agriculture industrielleL’ironie du sort veut que la plupart des exploitations industrielles françaises sont aujourd’hui gérées par des familles d’agriculteurs qui luttent pour leur survie. Si certains d’entre elles regrettent leur choix (travail pas gratifiant et revenus insuffisants), elles n’ont désormais plus d’alternative et doivent rester dans ce système afin de rembourser les énormes dettes contractées.
L’agro-industrie exploite les paysans à travers un système de contrats entre producteur et industriel (contrat d’intégration) - système dans lequel elle impose le prix et les méthodes de production, sans en supporter les risques. On peut citer le géant de la production de volaille Doux ainsi que la Société Bretonne de Salaisons, filiale du conglomérat américain Smithfield. Ces compagnies, comme beaucoup d’autres, ont signé des contrats avec des milliers de paysans français, principalement en Bretagne.
Des problèmes environnementaux harcèlent le Nord-ouest
Les conséquences environnementales causées par l’élevage industriel sont particulièrement prononcées en Bretagne où se concentre plus de la moitié de la production porcine française. Les habitants de cette région souffrent de nombreux problèmes de santé.
Le niveau des nitrates dans l’eau est tellement élevé que l’eau du robinet n’est pas potable. Les zones côtières de cette région fortement touristique risquent d’être polluées. Les mauvaises odeurs sont souvent insupportables pour les riverains. Si la Bretagne a commencé à imposer des restrictions, ceci n’a fait que transférer le problème en délocalisant la production industrielle dans des régions voisines, notamment en Normandie et dans Pays de Loire.
Délocalisation des emplois
On constate que certaines multinationales et coopératives ont commencé à transférer leurs usines à l’étranger pour baisser encore davantage leurs coûts. Les salaires plus élevés et le respect des contraintes environnementales dans les pays industrialisés augmentent leurs coûts de production.
Les multinationales ont ainsi compris les avantages à tirer de prix de production bas et de gouvernements « plus coopératifs » des pays en voie de développement, particulièrement dans les pays où le coût du fourrage est bas et cette matière première est largement disponible.
Le Groupe Doux, par exemple, abandonne progressivement les producteurs intégrés européens et transfère certaines de ses opérations au Brésil, pays qui est déjà l’un des plus importants producteurs et exportateurs de viande au niveau mondial. Ce phénomène ne fait qu’augmenter la pression sur les prix payés aux producteurs français. Ces derniers n’ont pas de choix: soi ils s’adaptent à ces prix bas d’importations en adoptant des modes de production encore plus industriels, ou alors le « client », c’est-à-dire la multinationale, rompt unilatéralement le contrat. En toute légalité.
Les paysans français sont aujourd’hui confrontés à la dure réalité d’une globalisation de l’industrie agro-alimentaire: la production industrielle, qui n’est pas enracinée dans un territoire particulier, peut se délocaliser à tout moment dans un autre pays où les coûts sont plus bas et les lois plus laxistes.
The Meatrix s’engage à éduquer le public dans le monde entier sur les questions de durabilité, en particulier en matière de production agricole et de consommation alimentaire. Cette page d’action est un moyen pour communiquer avec les personnes intéressées en France, pour les encourager à s’engager au niveau local, mais aussi à échanger informations et expériences au niveau international. Ainsi nous espérons créer un réseau global de personnes, de collectifs et d’organisations qui s’engagent à faire avancer des méthodes de production agricole et des comportements de consommation alimentaire durables. Source : http://www.themeatrix.com/intl/france/